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T'écouter, t'entendre, m'écouter pour me faire entendre

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08082011

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T'écouter, t'entendre, m'écouter pour me faire entendre Empty T'écouter, t'entendre, m'écouter pour me faire entendre




Comment faire pour me faire entendre?

Dans une situation banale ou difficile de communication, je remarque parfois que je me préoccupe beaucoup plus de cette question me concernant que de savoir comment écouter l'autre.
C'est alors à celui qui parlera le plus "fort" ou développera l'argumentation la plus convaincante.
Est-il possible de sortir de ce genre de situation stéréotypée, voire de débloquer une situation de conflit ?


*


L'écoute est beaucoup plus qu'un simple phénomène acoustique, elle requiert ma présence afin que je puisse

  • rejoindre l'autre là où il vit, là où la vie sourd en lui comme une nappe aquifère dont je suis le sourcier.



Car parfois, par delà les discours qui risquent de nous hypnotiser, nous ne voyons ni ne devinons plus cette vie qui tente de se manifester en nous et à l'extérieur de nous par des états d'être qui peuvent se révéler parfois fort discrets - ou secrets -, traduisant mal les sentiments les plus divers, tels que: découragement, tristesse, colère, désespoir, joie, crainte, ...

Souvent, une part importante du monde des ressentis, intuitions, sentiments et émotions - surtout celle qui est considérée comme négative - est rejeté dans notre société, au seul profit d'une Pensée Unique presque exclusivement rationnelle et utilitaire qui se dévitalise et s'appauvrit de ces autres dimensions. Cela peut aller jusqu'à nous amener à négliger, ignorer, oublier, refouler, maquiller, cacher la part irrationnelle comme si elle était une déficience ou une incongruité.
Nous restons alors seuls avec cet univers intime, parfois même sans possibilités de le partager avec des personnes auprès desquelles nous voudrions être le plus proche.
Pourtant, il y a là toute une palette extrêmement riche et variée du vivant qui tente de se faire entendre à nous, par nous, et de nous appeler vers notre devenir, si nous savons nous permettre d'être, accompagner et traverser ce qui est.
La condition pour cela, tout d'abord, c'est d'être présent avec ce qui est - et non avec ce que nous croyons qui devrait être.
L'autre, sous certaines conditions, peut parfois nous accompagner sur ce chemin.

C'est une grâce quand nous avons parmi nos proches quelqu'un qui sait nous accompagner là où nous sommes en crise -et cela peut nous arriver à tous, il n'est pas besoin d'être "déséquilibré" pour cela- sans vouloir intervenir immédiatement pour tenter de nous influencer, nous contester, nous contrôler, interférer avec son monde d'idées, de valeurs ou de sentiments.
Malheureusement donc, trop souvent, l'autre se précipite sur nous pour tout arrêter. Souvenons-nous: "Ne pleure pas, ce n'est pas grave, ça va s'arranger !". Où encore: "Moi aussi j'ai vécu ça, et je m'en suis sorti comme ça !". Ou encore: "Calme-toi, ne t'énerve pas comme ça !" Ou encore: "Tu te trompes, tu exagères, tu es complètement parano!".
Parfois, dans ces moments-là, c'est comme si nous ne supportions pas d'être mis en danger nous même dans ce que nous voulons, pensons, croyons, nous interdisons de ressentir ou de remettre en question, et que nous nous servons de notre raison et de notre "volonté de puissance" pour éteindre le feu de l'émotion sous-jacente en supprimant l'autre.
Aussi, les réflexes de peurs et d'interdictions se lèvent vite: "Voyons, je ne vais quand même pas me laisser aller / te laisser aller à cette pensée inhabituelle ou inacceptable pour moi, à ce sentiment de (colère, tristesse, désespoir...) !!!"
A ce moment-là pourtant, la rencontre de l'autre peut être salutaire, car elle nous oblige à abandonner des positions de vie -ou de survie- dépassées, incomplètes dans leur prétention à la généralisation.

En résumé: si certaines conditions sont respectées, l'autre peut réveiller, relancer, restimuler la vie qui sommeille en nous, qui s'est retranchée, tapie au fond de nous dans des pensées ou des émotions figées.





Dans ces différents exemples cités plus haut, c'est comme si un combat se menait simultanément en nous et au dehors de nous entre

  • notre capacité raisonnante de penser



et

  • notre capacité résonnante, vibrante, vivante de ressentir, nous mettant en synchronisation avec la vie qui se présente à nous dans l'instant présent.



A ce propos, une différence essentielle doit être remarquée entre deux états qui se ressemblent mais sont exactement opposés, à savoir: l' état confusionnel et l 'état empathique.

L'état confusionnel est une concurrence entre le besoin de l'autre et le mien non reconnu -qui peut aussi s'exprimer par une concurrence d'idées ou prendre dans un premier temps la forme provisoire et trompeuse d'un accord inconditionnel et merveilleux- alors que l'empathie est la capacité de laisser l'autre penser et éprouver ce qu'il vit de différent de moi en l'accompagnant là où il en est sur son propre chemin parce que, le temps où j'ai choisis de me recueillir dans l'écoute, je me suis rendu capable d'être totalement présent à lui en m'oubliant moi-même.

L'empathie est l'état optimal d'écoute bienveillante que je peux développer tant pour l'autre que pour moi-même grâce à l' "écoute active".

Un de mes objectifs personnels est de développer cette qualité et de permettre à tous ceux que cela intéresse également de la développer dans le groupe

Mais il tient de la gageure de rester dans cette position à la fois de présence à l'autre et de distinction d'avec soi dans le cas où l'autre n'a pas d'autre recours pour affirmer / exprimer sa différence, son mal-être voire sa souffrance que d'adopter plus ou moins consciemment ou volontairement un comportement provocateur, voire carrément violent.

C'est là que tout se joue, là est la racine de tous les processus d'escalades plus ou moins accentués: dans l'incapacité de détecter ces moments charnières où nous "fusionnons avec l'autre".

Car alors, la pensée, l'opinion affichée, l'intuition, le ressenti, le sentiment ou l'émotion de l'autre bondit sur nous en nous faisant re-bondir, réagir, et c'en est fini de la possibilité de nous rencontrer: à ce moment-là nous ne pouvons plus nous être utile, étant devenus soit trop proches et identiques, soit trop éloignés et concurrents, voire ennemis.


*


L'autre alternative est d'avoir un jour en situation -situation qui peut être travaillée par des jeux de rôles- le bon réflexe, la vigilance, la prise de conscience qu'à travers ses opinions qui nous dérangent, ses insinuations, ses jugements, voire pire son déluge de reproches, d'attitudes outrées et de mots (de maux), l'autre dit parfois discrètement, parfois dramatiquement autre chose que ce que nous croyons entendre parce qu'il n'a pas les mots pour le dire.
Il semble qu'il s'adresse à nous, mais en réalité il ne parle pas vraiment à nous, ni de nous ni sur nous, mais simplement de son opinion, sa pensée, sa difficulté à lui, bref sa différence.

Par conséquent, au lieu de prendre ce qu'il dit pour argent comptant et de nous enferrer dans

- une position d'auto justification,
- un jugement, un repli stratégique, une rigidité,
- une émotion (brutalement réactivée par l'agression que nous estimons subir injustement)

...autant de réponses inadéquates qui ne feront évidemment que l'éloigner de lui-même et de nous, rajouter de l'huile sur le feu, nous pourrions plus utilement le rejoindre en le confirmant dans sa position ici et maintenant d'une manière différente de la sienne. Comment? En lui faisant des propositions parlées qui mettent précisément les mots sur ce qu'il pense, vit, ressent et qu'il n'arrive pas à dire autrement, lui permettant de reconnaître, confirmer, préciser, identifier et nommer ses opinions, ressentis, intuitions et sentiments ("Tu penses que.../ tu tiens à... / tu espères que... / tu te sens inquiet, déçu, furieux, contrarié, chagriné... parce que... ???").
En d'autres termes en pratiquant un langage à la fois de différenciation (ce n'est pas moi mais bien toi qui est dans cette position) et d'acceptation (mais je reconnais là où tu en es maintenant).


*


Dans une situation difficile, si nous pouvons une première fois adopter cette démarche non-violente au lieu de céder à notre réflexe primaire, une étape fondatrice aura été franchie.

Immédiatement après, une satisfaction voire un apaisement sera visible chez l'autre car il aura reçu la permission d'émettre sa pensée d'affirmation, de vivre son émotion / sentiment / ressenti -même à sa manière très différente de la notre ou de notre point de vue inappropriée- sans avoir été blâmé ni détourné de son propre chemin par des conseils ou thèses concurrentes, mais au contraire en ayant même -dans le meilleur des cas- suscité en retour chez l'éventuelle "victime" de sa maladresse ou de son indélicatesse du respect, de l'attention, de l'intérêt et du souci pour ce qu'il pense, ressent et vit.

Chose nouvelle, dans un contexte de tension voire d'engrenage de conflit, l'autre sera capable alors d'abandonner la sphère exclusivement idéologique ou émotionnelle et de se permettre de glisser, de s'ouvrir à une autre manière de voir sa situation, alors que si nous avions tenté de l'y amener de force prématurément, il aurait freiné des quatre fers.

Cette étape préalable d'affirmation de sa différence et de vérification de notre tolérance et respect pour cette différence lui était donc indispensable pour qu'il se donne la permission de changer librement et à son rythme.



*


C'est alors le moment, si nous le pouvons, de l'inviter à identifier et verbaliser les circonstances précises qui ont été à l'origine de son mal-être.

Néanmoins, ici encore, il faut rester vigilant et ignorer les messages provocateurs explicites ou implicites, afin de ne retenir que les faits en relation avec son état émotionnel précédent, sans quoi on risque fort de se retrouver ramenés à la case départ...


*


Ensuite, il est possible de l'aider à identifier qu'un besoin qu'il n'avait pas identifié ni nommé n'avait pas été respecté, -besoin qui était précisément la valeur positive de son état "négatif"- dont le sentiment n'était que l'indicateur, le drapeau, le porte-parole dérangeant et inconscient, tout simplement pour appeler à l'attention et à l'examination.


*


Enfin, il est possible de l'inviter à formuler les attentes précises qu'il avait eu et qui ont été déçues.



*
* *


Si l'autre a pu être accompagné jusqu'à ce point -ce qui en général est plutôt rare dans les communications courantes dans notre société-, il éprouve un apaisement. Voilà pour une fois qu'il se sent rejoint dans sa souffrance au lieu d'être agressé en retour et que celle-ci soit aggravée, ou qu'on lui serve des objections, conseils, réactions, négations, questions, jugements, émotions, qui l'éloignent de lui-même, créent de nouvelles vagues qui le figent dans sa définition identitaire et l'agitent d'avantage.

Le voilà donc dans des dispositions plus propices pour écouter.

Mais, question, sera-t-il néanmoins capable à ce stade de passer à son tour de l'étape "écouter" à l'étape "entendre" sans réagir, tel que vous l'aurez fait pour lui?

Car malheureusement, l'autre n'a pas nécessairement développé son potentiel d' "empathie" et d' "écoute active"...
Si c'est le cas, comment faire? Souhaitons-nous faire courir le risque à cette personne que nous respectons / à cette relation dont nous avons besoin / à laquelle nous tenons, d'une nouvelle escalade?

Avant de lui parler, il peut être judicieux de nous écouter nous mêmes, ou de choisir une personne ou un groupe qui peut nous offrir cette qualité d'écoute afin de nous aider à notre tour à mettre de l'ordre en nous de telle sorte que nous puissions faire l'économie des provocations et des agressions implicites ou explicites que nous n'aimerions pas subir nous mêmes si nous étions placés dans sa position...

D'autre part, pour notre propre intérêt, plutôt que d'insinuer puis réagir à sa réaction, ou de carrément nous défouler en retour sur lui et qu'il ne veuille ensuite plus rien entendre, il est peut-être préférable de savoir précisément et réalistement ce que nous souhaiterions lui dire et de lui demander de vraiment important avant de lui parler, afin de ne plus revivre la même situation ou pire.

Si nous optons pour cette solution, il nous est possible à notre tour d'identifier et de nommer quels sentiments, circonstances liées aux sentiments, besoins et attentes nous ont mis en difficulté, cette fois sous la forme de "messages je".

Ici également, nous nous heurterons probablement à des habitudes fortement ancrées et seul un entraînement régulier pourra nous permettre de les changer sur le vif en situations réelles.



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Pour conclure, en cas de désaccord ou de conflit, c'est donc seulement après avoir écouté, entendu l'autre et nous même que nous aurons créé les conditions les plus propices pour tenter de nous faire entendre par l'autre sans courir le risque d'être ré entraîné dans des eaux tumultueuses.

Sur ce chemin, un travail d'écriture et l'envoi d'une missive peut être une étape qui s'avère utile, voire indispensable -au même titre que la participation active à des jeux de rôles-, ceci avant que nous nous sentions suffisamment assurés dans la démarche de communication non-violente pour vouloir nous confronter oralement, directement à la situation et rencontrer la personne concernée, sans devoir passer par des procédures et des intermédiaires.



Bruno Mariembourg
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